Après l’album au féminin avec toute la douceur qui va avec, nous vous proposons l’album à guitares, si possible avec un peu de boucan. Juste pour le plaisir du contraste.
Or, ce disque pourrait illustrer l’une de nos théories du rock. En l’occurrence, on pourrait dire que le rock à guitare n’intéresse plus grand monde, en tout cas assez peu les jeunes. Preuve à l’appui, il suffirait de parcourir les palmarès des 5 ou 10 dernières années. En gros, il y a presque un petit créneau à prendre qui se définirait comme le groupe du moment à guitares. Bien entendu, on parle ici de groupes nouveaux, qui nous donnerait envie de les suivre pour réveiller la flamme, donc forcément un peu « indie » dans l’esprit.
Et il n’y a pas grande concurrence. En gros, chaque année, on trouve un ou deux disques sur une cinquantaine. Les sensations du genre des dernières années ont pu se nommer Fountains DC, The Idles, Shame… Sachant que les anciens du genre troquent souvent leurs guitares pour autres choses (cf. The Strokes, King of Leon, Arcade Fire etc.).

Donc, avec vous, on prend le pari que 2021 sera le tour de Dry Cleaning. Et ma foi, ils nous présentent là un disque qui fait à la fois travailler notre mémoire (parce qu’il y a des saveurs qu’on connait) et en même temps ils nous proposent une formulation musicale nouvelle…. et sexy.
Un disque qu’on dédie à la mémoire de Fracas, car, sûr qu’il l’aurait aimé et chroniqué!
Qu’y a-t-il à dire de ce groupe qui pourrait vous donner envie de l’écouter? Pour le plaisir, on va commencer par ce qui ne vous donnerait pas envie. Alors, imaginez une basse une batterie dont le job serait d’en faire le moins possible. Juste ce qu’il faut pour que la chanson se tienne. Ensuite, prenez une voix androgyne qui ne chanterait presque pas. Un chant proche du parler, un peu comme Lou Reed, mais en plus neutre, sans l’ironie, sans la tendresse, sans la gouaille. On dira qu’il s’agit de l’anti-Adèle. Pas de démonstration. Pas d’étirement de voyelle à ne plus en finir. Pas de gimmick. On dirait qu’elle refuse tout simplement ce qu’on a envie ou, plus exactement, ce qu’on a l’habitude d’avoir.
Puis, imaginez toute la place que tout ceci laisserait soit prise par les guitares. Plus exactement par une seule et unique guitare, car on reste dans une approche minimaliste. Son job serait justement de nous faire oublier la pauvreté (volontaire) du reste (et peut-être qu’elle est toute seule à se démener). Mais pas d’une façon démonstrative, non, plutôt dans un esprit punk où l’imagination primerait. Quelque part entre John McGeoch de Magazine/Siouxsie et Geordie Walker de Killing Joke, mâtiné du son du premier Wire ou de Sonic Youth.
Et soudain, l’alchimie prendrait forme et renverserait la donne. Ainsi, le contraste entre cette guitare sur qui tout tient et cette voix qui refuse de prendre la place qu’on lui accorde habituellement devient soudain étrangement sexy. On croirait entendre à chacune des phrases comme trois petits points en suspension. L’une et l’autre interagissent entre elles et créent justement quelque chose d’inattendu. Et c’est tout à fait addictif.
Bien entendu, vous aurez compris qu’on est clairement dans du post-punk, Donc si vous vouliez de la dentelle ou du roots façon US, ça se passe dans la pièce d’à côté. On entend déjà certaines dire que si ce premier LP fait partie des plus belles promesses de l’année, le danger du prochain album sera d’autant plus grand pour transcender la formule présentée ici. Une formule dont la beauté serait justement qu’elle ne tient quasiment à rien.
Mais en attendant, peu importe l’avenir quand le présent nous tend les bras avec des guitares. Il faut les saisir et lancer une prière pour que ça continue!
Assurément la meilleure nouveauté avec un peu de bruit qu’on est entendue cette année. Et ça se trouve ici
Francis
Si à l’instant j’avais le temps d’écouter un groupe rock à guitares électriques, ce serait quelque chose de plus furieux, comme LANE :
https://viciouscircle.bandcamp.com/album/pictures-of-a-century
J’aimeAimé par 1 personne
Oui, ça sonne tout à fait bien à mes oreilles. Le bon son de guitare, une bonne rythmique. Un peu entre Sugar/Husker Dü/Sugar et The Chameleons, je trouve. Mais il manque quelque chose pour que j’y trouve vraiment quelque chose de neuf, ça flatte ma nostalgie, et c’est justement un truc dont je me méfie…
Francis
J’aimeJ’aime
Pour moi ce n’est pas de la nostalgie parce que j’ai toujours eu une petite place pour le genre, ce serait plutôt du ressassement en ce qui me concerne.
J’aimeJ’aime
Un clin d’œil, et hommage à Fracas. Un livre cosigné par Le Boss et Barack Obama est sorti hier chez Fayard. »Born in The USA. » Dixit le journaliste, « une conversation d’une liberté folle, illustré de photos inédites. »
Eric.
J’aimeJ’aime
Ca m’a remis sur une autre voie, celle de Urban Verbs…
Sinon, bien écouté et une chronique impec pour y aller.
THX
J’aimeJ’aime
Come PascalGeorgiomino. Une chronique dangereusement honnête, quelques écoutes pour te donner raison sur ce qui pourrait faire vite abandonner. Le contraste entre cette vois sans émotion – moi qui recherche avant tout l’émotion dans la musique la voix – et cette guitare à peine plus chaleureuse.
Ici comme dans l’autre papier des nouveautés, vous avez privilégié l’absence d’esbroufe, même si ici c’est poussé à l’extrême.
Il ne reste plus qu’à répondre à une question: que peut-elle nous raconter avec ces airs d’intimité revenus de tout.
Surprise moins ennuyeux qu’il me semblait, je pensais la guitare indispensable pour accrocher, mais la dame intrigue, inquiète. Merci de nouveau
J’aimeJ’aime
Je crois que tu exactement trouvé le truc. On a envie de savoir ce qu’elle dit. Le contraste crée tout un mystère.
J’aimeJ’aime